La privation de vue peut constituer un trouble anormal de voisinage.
Votre superbe vue dégagée sur la mer ou sur la montagne se retrouve obstruée par une nouvelle construction voisine ? Les procédures judiciaires pour trouble pour privation de vue conduisent généralement à des condamnations à dommages-intérêts, voire à la démolition.
Que votre vue soit gâchée ou que vous souhaitiez éviter de cacher la vue de votre voisin, faisons le point sur la notion de privation de vue.
Nous parlons de privation de vue quand quelqu’un réalise une nouvelle construction obstruant la vue dont bénéficiait un voisin. La vue dont il s’agit peut être une vue sur la mer, ou bien une vue sur la montagne, sur un monument, sur un parc, sur une ville, etc… Mais il peut aussi s’agir de n’importe quelle vue dégagée présentant un intérêt.
La privation de vue affecte les conditions de jouissance d’un bien et en fait baisser la valeur immobilière. Si la nuisance est importante, elle caractérisera un trouble anormal de voisinage (TAV).
Toute personne estimant subir un préjudice par une construction voisine peut ainsi assigner son voisin au civil (tribunal judiciaire). La privation de vue est souvent associée à d’autres TAV : la perte d’ensoleillement et la perte d’intimité.
Le trouble anormal de voisinage est donc très différent du recours des tiers contre les permis de construire. Le recours des tiers s’exerce dans le but de faire annuler le permis de construire. Il s’agit donc d’une procédure administrative.
Tandis que dans le cas du TAV, la victime attaque le voisin à l’origine du trouble. Il s’agit d’une procédure civile, sans aucun rapport avec la légalité du permis de construire. La victime n’a pas besoin de prouver que son voisin commet une infraction à l’urbanisme.
L’auteur du trouble peut ainsi respecter toutes les règles d’urbanisme et devoir des dommages-intérêts à son voisin !
La victime d’un trouble de voisinage dispose d’un délai de 5 ans à compter de la fin de la naissance du trouble pour agir en justice ! (art. 2224 du code civil)
Disons-le tout de suite : obtenir réparation d’un préjudice pour privation de vue n’est pas chose aisée ! La jurisprudence est moins favorable à la victime que dans le cas d’une perte d’ensoleillement ou une perte d’intimité.
Il faudra généralement un peu plus qu’une privation de vue pour espérer obtenir une quelconque indemnisation ou remise en état. La vue dont bénéficie un propriétaire n’est pas acquise. En effet, il n’existe pas de droit de vue ou de privilège de vue.
Cependant, le juge prendra en compte prendra souvent en compte ce trouble lorsqu’il y a également une perte d’ensoleillement ou
une perte d’intimité.
L’auteur d’un trouble de voisinage est généralement condamné à verser des dommages intérêts à la victime. On calcule l’indemnisation
principalement selon la dépréciation de la valeur vénale du bien immobilier.
Mais certains juges ont parfois ordonné la démolition de la construction litigieuse. Enfin, il est important de noter que pour obtenir une réparation du préjudice, la privation de vue doit être significative.
À titre d’exemple, une indemnisation pour privation de vue, d’ensoleillement et d’intimité peut atteindre 40% de la valeur vénale de la maison, ainsi que 50 000 € au titre du trouble de voisinage (CA Limoges, 08/10/13, n°12/00625).
Avant tout, vous devrez démontrer l’existence de la privation de vue ainsi que son importance. Seule une expertise de privation de vue permet de prouver l’intensité du trouble subi. Cette expertise est indispensable pour évaluer le futur préjudice quand les travaux de la construction litigieuse n’ont pas démarré.
Il vaut mieux agir quand les travaux n’ont pas encore débuté ! En effet, c’est avant le début des travaux que vous pourrez plus facilement négocier une modification du projet voisin. Plus vous attendez, plus vos chances de conserver votre vue s’amenuisent. Lors d’une négociation amiable, l’expertise de privation de vue permet de simuler la future vue et de prouver au voisin que vous êtes en droit de lui demander une indemnisation s’il réalise son projet tel que prévu. C’est alors un argument de poids pour obtenir une modification, voire un arrêt du projet.
Le risque de trouble pour le voisin est à anticiper dès le dessin des premiers plans. Votre architecte doit faire en sorte que le projet qu’il conçoit ne gâche pas la vue dont bénéficie les voisins.
Si vous venez d’obtenir votre permis de construire et que votre voisin se plaint d’une privation de vue : il faudra vous défendre ! Très souvent, le voisin n’aura pas pris la peine de mandater un expert pour prouver son préjudice.
Cependant, débuter vos travaux avec le risque d’être assigné au tribunal pendant 5 ans n’est pas prudent… Pour savoir si votre voisin est en droit de vous demander une indemnisation, vous pouvez faire réaliser une expertise avant le début de vos travaux.
Source : Perie-archi.fr