Il arrive que certains locataires quittent le logement sans résilier le bail, partant, comme on dit, « à la cloche de bois ».
Comment pouvez-vous récupérer le logement « légalement » dans ce cas, récupérer une éventuelle ardoise, mais aussi les clés ?
La situation n’est pas aussi simple qu’elle en a l’air.
Si votre locataire est parti sans résilier officiellement le bail, vous n’avez pas le droit de récupérer votre logement en pénétrant à l’intérieur et en changeant les serrures. Vous vous mettriez en faute si le locataire décidait, finalement, de revenir.
Pour faire les choses dans les règles et reprendre votre logement, vous devez, comme le prévoit la loi du 6 juillet 1989, engager des démarches spécifiques indiquées dans notre vidéo ci-dessous.
Ainsi, vous devez d’abord faire appel à un huissier de justice pour constater l’abandon du logement, puis saisir le juge pour obtenir la résiliation du bail.
Commencez par vérifier qu’il s’agit bien d’un départ définitif, en récoltant des éléments de preuves, de préférence par écrit :
L’huissier de justice peut se rendre à l’adresse du logement, mais il n’a pas non plus le droit d’y pénétrer seul. Il peut, toutefois, réaliser des
constatations qui peuvent se révéler utiles, notamment par le biais de photos.
Si vous êtes quasi certain que le logement est abandonné, adressez à votre locataire, par l’intermédiaire d’un huissier, une mise en demeure destinée à justifier qu’il occupe bien le logement.
L’objectif est de prouver que le locataire est effectivement parti et ne vit plus dans votre logement.
Attention : cette procédure est réservée aux logements faisant l’objet d’un bail nu. Dans le cas d’un logement loué meublé, le bailleur doit engager une procédure d’expulsion pour loyers impayés.
Sans réponse du locataire dans un délai d’un mois, l’huissier constate que le logement a été abandonné et qu’il y a eu départ effectif du locataire. Cependant, l’huissier ne peut pénétrer seul dans le logement, mais, il peut être accompagné :
En parallèle, le cas échéant, il réalise un procès-verbal répertoriant les meubles restés dans les lieux ainsi que leur valeur éventuelle. Mais,
attention, ce constat ne suffit encore pas pour reprendre le logement dont le bail se poursuit. Seule la décision d’un juge pourra y mettre fin.
Il vous faut donc vous tourner vers le tribunal judiciaire du lieu où se situe le logement loué pour demander la résiliation judiciaire du bail et la reprise du logement suite au constat de départ du locataire. Le juge produira alors une ordonnance qui vous rendra la pleine propriété de
votre logement.
Attention ! Il est indispensable, à ce stade de la procédure, d’informer votre locataire de cette décision. Vous avez 2 mois maximum pour le faire car au-delà de ce délai, si l’ordonnance n’a pas été signifiée au locataire, elle devient caduque. Si le locataire est parti sans laisser d’adresse, envoyez-lui la lettre dans votre logement ; la justice ne pourra rien vous reprocher.
Cette information au locataire doit obligatoirement contenir :
Le locataire dispose d’un délai d’1 mois pour s’opposer à cette décision de résiliation du bail. S’il le fait, vous serez convoqué avec lui au
tribunal. Le jugement de ce dernier se substituera alors à l’ordonnance.
Si le juge constate que votre demande initiale est abusive, vous pouvez être condamné au versement d’une amende pouvant aller jusqu’à 3.000 €.
Sans nouvelles du locataire, une fois la résiliation effective, les meubles et les autres biens laissés éventuellement dans le logement peuvent être vendus aux enchères, avec l’autorisation du juge.
Le strict respect de cette procédure est primordial si vous ne voulez pas avoir de problème, comme l’a rappelée une jurisprudence.
La Cour de Cassation (arrêt n°16-15.752 / 6 juillet 2017) a, en effet, condamné un huissier ayant réalisé un procès-verbal de reprise des lieux, alors que la procédure n’avait pas été menée jusqu’au bout. Aucune mise en demeure ou décision de justice constatant la résiliation du bail n’avait, en effet, eu lieu.
Le locataire avait déposé une plainte à la suite du changement des serrures, et des dommages-intérêts avaient été réclamés. Le locataire avait d’abord été débouté pour cette demande par le Tribunal, puis par la Cour d’Appel, qui avaient indiqué qu’il n’avait pas subi de préjudice puisqu’il était déjà parti.
Mais tel n’a pas été l’avis de la Cour de Cassation. Celle-ci a indiqué que le locataire n’avait pas besoin de justifier un préjudice pour être
indemnisée d’une procédure non respectée.
Morale de l’histoire : le simple fait d’avoir repris le logement sans respecter toutes les étapes obligatoires ouvre droit à réparation pour le
locataire.
Parallèlement à la récupération de votre logement, il vous faut penser à récupérer les loyers impayés, s’il y a lieu. Dès le premier impayé, pensez à faire une déclaration de sinistre dans les conditions prévues dans votre contrat d’assurance si vous en possédez un. La garantie Visale, dans ce cas de figure, peut aussi bien agir.
Le locataire peut aussi être parti en ne payant pas le dernier loyer, pensant que le dépôt de garantie que vous garderez fera l’affaire. Cette pratique est illégale. Si votre locataire est parti en laissant une ardoise, la mise en demeure envoyée pour vérifier l’abandon effectif du logement, peut être accompagnée d’un commandement de payer.
Signalez le plus rapidement possible le départ intempestif de votre locataire à votre centre des impôts. En effet, vous serez, sinon, considéré comme responsable des sommes dues au titre de la taxe d’habitation de votre locataire si vous n’avez pas, dans les 3 mois, signalé ce départ à l’administration fiscale.
A défaut, celle-ci sera en droit de vous réclamer la taxe d’habitation du logement loué et occupé au 1er janvier par votre locataire parti.
Source : Gérer seul ma gestion locative