Deux exemples de modes d’acquisition de servitudes : celles qui peuvent s’acquérir par le temps (trente ans de possession) et celles qui ne peuvent s’acquérir que par un titre.
Les textes régissant l’acquisition des servitudes sont les articles 690 et 691 du Code civil. L’article 690 stipule que « Les servitudes continues et apparentes s’acquièrent par titre, ou par la possession de trente ans. ».
L’article 691 énonce que « Les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues, apparentes ou non apparentes, ne peuvent
s’établir que par titres. »
Dans le premier cas, celui qui entend lui opposer une servitude peut soit produire un titre, soit apporter la preuve qu’elle existe depuis au moins trente ans. Dans le second cas, seul un titre peut établir la servitude.
Le Code civil précise : que « les servitudes continues sont celles dont l’usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait actuel de l’homme : tels sont les conduites d’eau, les égouts, les vues et autres de cette espèce » ( article 688 ). « Les servitudes apparentes sont celles qui s’annoncent par des ouvrages extérieurs, tels qu’une porte, une fenêtre, un aqueduc » ( article 689 ).
Une fenêtre permettant de voir au travers, une porte, ou un canal de dérivation, sont des servitudes apparentes et continues, sachant que leur
usage est permanent.
« Les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l’homme pour être exercées : tels sont les droits de passage, puisage, pacage, et autres semblables » ( article 688 du code civil ).
« Les servitudes non apparentes sont celles qui n’ont pas de signe extérieur de leur existence, comme par exemple, la prohibition de bâtir sur un fonds, ou de ne bâtir qu’à une hauteur déterminée. » (article 689 ).
Une servitude d’égout d’eaux usées exige pour son exercice l’action de l’homme et est donc discontinue, tout comme un droit de passage. Une canalisation enterrée n’est pas apparente, même si ses extrémités sont visibles.
Jurisprudence : selon le jugement du TGI Strasbourg du 14 mars 2013
Il s’agit donc d’une servitude apparente et continue. En l’espèce, il s’agissait de deux constructions mitoyennes et anciennes, et l’un des
immeubles était équipé au rez-de-chaussée d’une fenêtre ouvrante donnant directement dans la cour du voisin.
L’ancien propriétaire utilisait le rez-de-chaussée comme remise et, par conséquent, la fenêtre n’était pas destinée à regarder dans la cour du
voisin.
L’immeuble a été vendu, et le nouveau propriétaire a créé un logement au rez-de-chaussée, si bien que le voisin a considéré que l’usage de la
fenêtre était modifié : celle-ci constituait dorénavant une vue, et il en a demandé la suppression.
Le TGI de Strasbourg a rejeté la demande en adoptant les motifs suivants : « Il résulte de la comparaison des photographies produites de part et d’autre et des témoignages, que la fenêtre litigieuse existait déjà avant les travaux exécutés en 2008, et ceci depuis la construction de l’immeuble en 1947, sauf qu’elle était munie de barreaux et avait été obstruée sur les barreaux vers l’extérieur, à un certain moment, sans que soit établie sa date de mise en place, d’un rideau de paille tressé pouvant être facilement enlevé ».
Moralité, le propriétaire d’un immeuble mitoyen, qui est confronté à une fenêtre ouvrante, a tout intérêt de ne pas attendre trente ans avant de demander sa suppression, même si cette fenêtre ne lui cause aucune gêne, car l’avenir étant changeant, il est préférable d’être prévoyant.
Jurisprudence : jugement du TGI de Strasbourg du 10 août 2012
Une canalisation enterrée d’eaux usées est une servitude non apparente et discontinue. Un titre est nécessaire pour établir une telle servitude.
En l’occurrence, le litige est intervenu, à la suite d’un changement de propriétaire. Le jour où elle a voulu construire, elle a fait valoir auprès
des nouveaux propriétaires l’existence de la servitude de canalisation.
Ceux-ci s’y sont opposés, et le tribunal a été saisi de la validité de ladite servitude. Le Tribunal de Strasbourg a rejeté le moyen sur la base invoquant d’un accord sous seing privé produit.
L’acquisition des servitudes, sont attachées aux fonds et ont, par conséquent, un caractère réel et immobilier. Un acte d’acquisition d’un droit réel, en l’occurrence une servitude, doit être notarié.
Source : Village-justice